150 pages, c’est peu. 150 pages seulement pour vous raconter de façon essentielle les 7 millions d’années qui ont produit l’humanité actuelle. Est-ce sérieux? Il y a quelques années, si on nous avait posé cette question, nous aurions répondu non. Ma complice, la paléoanthropologue du CNRS Silvana Condemi et moi-même – en buvant beaucoup de thé – avons portant relevé ce défi et écrit un livre qui sortira le 3 octobre 2018:

Après le tsunami Yuval Nooah Harari et son Homo Sapiens, une brève histoire de l’humanité, suivi de son inquiétant Homo Deus, nous devions le relever! Au lieu d’écrire un immense livre chaotique, il nous fallait l’écrire de façon vraiment courte cette «brève histoire de l’humanité.» Nous l’avons fait et découvert avec étonnement à quel point elle peut être simple, quand on la décompose en grandes étapes essentielles prouvées par des faits certains. Notre histoire est darwinienne. Il ne s’agit pas d’une destinée mythique (mythique? Oh Deus meus!), mais de l’évolution buissonnante de lignées préhumaines, puis humaines, qui a fait apparaître ce qui nous est propre. Du début à la fin de cette saga évolutive – avons-nous réalisé avec stupéfaction – c’est un seul et même mécanisme qui a fait franchir à nos ancêtres toutes les étapes de leurs transformation progressive en nous: ce mécanisme c’est la culture.

Qu’entendons-nous par là? «Tout ensemble de traits comportementaux, de symboles et d’idées partagées au sein d’un groupe animal.», avons nous défini dans notre livre, précisant aussitôt «Ce partage s’effectue à travers l’espace (c’est-à-dire qu’il y a transmission entre membres du même groupe) et le temps (à travers les générations)». Dit comme cela, cela semble bien aride, et, du reste, les sociétés de dauphins ou d’éléphants ont aussi des cultures répondant à cette définition. Si elle a produit dans notre cas une évolution différente que dans celui des chimpanzés, c’est donc que la culture humaine a quelque chose de spécial par rapport aux autres cultures animales : elle dirige l’évolution des humains avons nous mis en évidence.
Comment ? Certainement pas par une brutale «révolution cognitive» il y aurait quelque 80000 ans (Harari), mais par une lente évolution graduelle, qui a eu besoin de millions d’années pour développer les nombreux traits biologiques, cognitifs et techniques qui fondent le comportement que les préhistoriens qualifient de «moderne». Ce lent processus évolutif, dirigé et amplifié par la culture depuis des millions d’années, a:
-modifié notre biologie.
-accéléré notre vie sociale.
-doté les humains de techniques toujours plus efficaces.
-favorisé leur survie et par là leur multiplication.
Même s’il a toujours accéléré notre vie sociale, ce processus est resté lent jusqu’il y a quelque 10000 ans, époque où nous étions probablement moins nombreux que les bisons ou que les loups. Vous en doutez? Regardez cette courbe qui traduit ce que la culture a produit:

Même si cela ne se voit plus s’agissant des derniers milliers d’années, cette courbe est en escalier, chaque marche représentant l’une des étapes évolutives majeures de l’humanité. Dans notre livre, nous avons expliqué comment la culture humaine nous a fait grimper ces marches les unes après les autres en commençant il y a quelque 7 millions d’années avec Toumaï et en nous arrêtant à la naissance de l’État.
Comment sommes nous parvenus à cette synthèse ultracourte d’une saga évolutive ultra longue? Par le dialogue. Une conversation entre un journaliste scientifique, physicien théoricien de formation (donc spécialiste de la construction rapide de théories) et une paléoanthropologue d’expérience (donc spécialiste de la vérification lente et méticuleuse des théories) rompues aux fouilles, non seulement dans la terre à la recherche de fossiles, mais aussi dans les données à la recherche de preuves. Et pour cela, on peut lui faire confiance!

Le résultat est dans ce livre. Faites-nous plaisir : lisez le et acquérez comme nous l’avons fait une vision d’ensemble simple de notre évolution. Vous verrez: tout est beaucoup plus clair après. Comme nous, vous apprendrez tant de choses qu’il importe de savoir. Par exemple que ce qui a rendu possible la courbe démographique montrée plus haut est que nous sommes aussi des animaux domestiques, ou plus exactement des animaux autodomestiqués, ce qui explique que nous soyons capables de nous soumettre aux lois sociales et de nous multiplier. Alors, non, nous ne sommes pas un Homo deus ; nous serions plutôt un Homo domesticus, une espèce autodomestiquée qui a transformé la nature en les écuries d’Augias.
Heureusement, espérons nous , grâce à la discipline dont nous sommes capables, nous avons une chance d’y remettre de l’ordre et de devenir Homo libertus, un humain libre. Maintenant qu’il a embarqué tous les autres animaux sur une arche planétaire modifiée, Homo libertus, espérons-nous, saura cesser d’exagérer et restituer aux autres animaux assez de de leurs droits naturels, à commencer par de la liberté (et cela doit concerner aussi les animaux domestiques). Mais cela, chers lecteurs, c’est une autre histoire et ce n’est pas dans le livre!
Ce qui n’est pas dans le livre, aussi, c’est la biblio. Nous autres, bêtes scientifiques que nous sommes, sommes désolés de ne pas avoir eu la possibilité d’inclure dans une bibliographie les nombreux travaux sur lesquels nous nous sommes appuyés. Pourquoi sommes nous désolés? Parce que nous aussi sommes autodomestiqués, et dans dans le troupeau scientifique, cela se fait. Cela doit se faire! Alors, chers lecteurs, oyez: les références donnant les faits scientifiques sur lesquels nous nous sommes appuyés sont là:
La biblio de Dernières nouvelles de Sapiens!
Oui, ces références, nous voulions les inclure, mais elles auraient pu remplir plus de pages que le livre. Alors, cela nous aurait fait dépasser 150 pages…
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